13 avril 2023
Rude, le premier échange, avec Françoise Cotta. Très rude même. Le premier face à face en tournage a permis de tester mon engagement dans cette aventure humaine et politique.
Vous, les maires, êtes les complices de Macron. Il vous a bien eu, avec son grand débat et ses doléances. Il fallait être vraiment naïf pour croire qu’il allait accepter de les rendre public. »
Paris, jeudi 24 janvier 2019. Portrait de Françoise Cotta, Avocate

On peut dire que Françoise Cotta ne mâche pas ses mots. Cette grande pénaliste « pourfendeuse humaniste de l’injustice », de la « lutte des classes » ne s’encombre pas de détails. Elle ne tourne pas autour de l’écharpe tricolore. Elle va droit au but. Cash. Cinglante. Entière. Un vrai crash test pour tout aventurier de la cause démocratique, républicaine. Une petite recherche sur Internet nous donne le ton. Quelques portraits dans la presse nationale aussi. On y va pêle-mêle.
Sur le site d’informations indépendants Les jours, on peut lire :
Son rôle dans la série. La Roya.
À Paris, c’est une avocate redoutable et redoutée. Dans la vallée de la Roya, c’est une citoyenne qui aide les migrants. Elle en a recueilli plus de 450, en disant : « J’ai beau être avocate, je me fous de l’interdit. […] Si je fais ça, c’est simplement parce que je n’ai pas d’autre choix. Je ne suis pas une bonne sœur, je ne fais pas ça pour gagner mon paradis. […] Je ne peux pas vous expliquer pourquoi je fais ça. Je vous répondrais simplement que ça ne se discute pas. »
Son portrait dans Libération commence ainsi :
« L’avocate, grande pénaliste et pourfendeuse humaniste de l’injustice, accueille les migrants et rejoint les gilets jaunes sur les ronds-points. »
« La robe noire de Françoise Cotta s’est dressée pour défendre des dizaines de «déglingués», ceux qui ont poussé de travers ou pris le mauvais embranchement de la vie. Elle a trempé dans la misère des uns et les affres des autres, s’est retrouvée mouillée de larmes ou de champagne, ballottée d’une cour d’assises à une autre, trimbalée sur la tête comme un vulgaire imperméable un jour d’orage ou chiffonnée comme un coussin. La robe noire de Françoise Cotta est devenue tantôt une armure quand son corps vacillait sous les assauts de la maladie, tantôt une cape de combat quand il n’y avait plus que la parole pour sauver un homme. «Une putain de robe noire», résume l’avocate de 69 ans dans un récit de plus de trente ans de carrière. La quatrième de couverture voudrait faire croire que le noir de travail va être remisé au portemanteau. Mais à voir sa propriétaire siffler prestement son verre de vin et filer vers la DGSI où l’une de ses clientes a été placée en garde à vue, on en doute sérieusement. «Disons que je suis réserviste», dit-elle en souriant. »
Quand Françoise arrive, nos visages s’éclairent doucement, on se salue simplement. Après les présentations d’usage qu’entreprend Hélène, je comprends assez vite que celle-ci n’avait pas tout vraiment expliqué à l’avocate. Déjà que nos échanges allaient être filmés; ensuite que ma démarche était de mettre au tribunal le premier représentant de l’Etat. Rien que ça.
Comme exprimé plus haut, les premiers mots de Françoise sont délivrés en vérité, sans artifices. « Vous êtes vraiment sérieux ? Il n’y a rien à attendre. C’est un système qui est en mouvement et qui étouffe la démocratie, plus largement la République. Ce président et son gouvernement sont au service d’intérêts particuliers et d’une idéologie clairement assumée. »
Les uppercuts s’enchaînent pendant une dizaine de minutes. Je suis dans les cordes. J’encaisse les coups. Enfin j’essaie car je ne partais pas avec cette idée là quelques heures plus tôt. Avec un léger sourire en guise d’altérité. Même le caméraman a fini par se demander ce que j’allais faire dans cette galère. Il a fallu remonter la pente, petit à petit, argument après argument, avec courage, engagement et sincérité.
Finalement, j’ai pris ça comme un test d’engagement. Elle a dû se demander d’ailleurs qui était ce maire, rural, un peu foutraque, qui s’imagine attaquer en justice le Président de la République Française pour « non respect d’un engagement donné ». « Mais vous, monsieur le maire, peut-on vous attaquer pour des promesses que vous avez faites et que vous n’avez pas tenu ? ». Je bredouille un « euh non ».
Et le passing du fond de cour est imparable : « Pour Macron, c’est pareil ! ».
Au bout d’une heure d’échanges, vifs, sincères, argumentés de part et d’autre, on finit par se comprendre, se regarder, se faire confiance. Il y a les mots, il y a aussi le regard, le mouvement des mains, l’oscillation du corps. « C’est bon, je vous suis, on se lance », finit par me dire Françoise Cotta, en me proposant sa poignée de main. Je la saisie, comme une première victoire. À confirmer…